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Les infirmières françaises ne sont plus les bienvenues au Québec.
PUBLIÉ PAR NATHALIE SIMON-CLERC LE 12 AVRIL 2016 DANS À LA UNE, CHARLOTTE LOPEZ, NATHALIE SIMON-CLERC,
L’accord de reconnaissance mutuelle des diplômes (ARM) infirmiers entre la France et le Québec, officialisée et signée en grandes pompes en février 2014, bat de l’aile. L’ARM est aujourd’hui un obstacle pour les Français et engendre des situations sociales difficiles.
Par Charlotte Lopez et Nathalie Simon-Clerc
D’ici quelques semaines, Agnès Cardamone devra quitter la province et rentrer en France avec son fils de 16 ans, si elle ne trouve pas d’emploi. « J’arrive à court de mes économies », lâche-t-elle. Arrivée pleine d’espoir en août 2015 à Sherbrooke, l’infirmière-anesthésiste voit son rêve québécois virer au cauchemar. Recrutée en France par l’hôpital de Sherbrooke, elle quitte le vieux continent pour embrasser une nouvelle vie. D’ailleurs, son fils Jean-Baptiste, champion de tir à l’arc, est sélectionné pour les prochains Jeux du Québec. Elle-même est devenue bénévole dans le club de son fils. Pour des raisons personnelles, elle échoue au stage d’embauche de l’hôpital qui, selon elle, ne s’est pas déroulé dans les règles de l’art. Elle perd sa promesse d’emploi, et n’a obtenu depuis, que trois entrevues dans des hôpitaux québécois. « Humainement, c’est dur à vivre. À 44 ans, après 22 ans de pratique, rater un stage et voir les portes se fermer, c’est très dur à vivre. », convient l’infirmière.
On n’a pas les moyens d’embaucher des infirmières françaises
Selon elle, la reconnaissance des diplômes entre la France et le Québec, a créé un obstacle de taille : le stage de 75 jours imposé aux infirmiers français, qui nécessite une personne supplémentaire pour superviser. « Seuls les CHU peuvent financièrement se le permettre », explique Mme Cardamone. D’ailleurs, elle assure que beaucoup d’établissements de santé n’embauchent plus de Français. « On est en pleine réforme, et on n’a pas les moyens d’embaucher des infirmières françaises », entend-elle régulièrement. De plus, les nouvelles contraintes d’Immigration Canada, imposant des frais de 1 400$, de nombreuses formalités administratives et la preuve que l’embauche d’un infirmier étranger est préférable à un infirmier canadien, sont un obstacle supplémentaire à l’application de l’ARM.
D’autres situations sont plus difficiles encore. Pour cette infirmière qui, avec son conjoint et un bébé de un an, doit prendre son poste au Québec le 22 avril, toujours pas de visa d’immigration… Ils ont démissionné et ont tout vendu (maison, voitures, meubles), en vue de leur prochaine immigration qui pourrait ne jamais se concrétiser. Ils vivent à l’hôtel en France et font de l’intérim en attendant le précieux sésame.
Il faut supprimer le fameux stage de 75 jours
Du côté du Regroupement des infirmiers français au Québec (RIFQ), on tient le même discours. Nagia Idel Mehdaoui, infirmière française en dispensaire dans le Grand Nord, qui a bataillé pour la reconnaissance du diplôme français au Québec, est plutôt amère. « le fameux stage de 75 jours » est trop long selon elle, et constitue un frein. La conjoncture explique aussi la désaffection des employeurs vis-à-vis des infirmières françaises. « Entre 2010 et 2015, on a recruté 200 à 300 infirmières françaises par an, explique Mme Idel Mehdaoui, mais aujourd’hui, il n’y a plus de pénurie ». Elle ajoute que la réforme des CSSS engendrée par la loi 10, crée beaucoup de contraintes budgétaires sur les établissements de santé, qui trouvent moins d’intérêt à recruter des infirmières françaises, alors que chaque année une cohorte d’infirmières québécoises sort de l’école. « De plus, avec l’ARM, on a été reconnu comme bachelier, donc on coûte plus cher », fait également valoir la professionnelle de santé.
Pour relancer un ARM à bout de souffle, Nagia Idel Mehdaoui propose de supprimer le stage de 75 jours, comme c’est déjà le cas en France pour les infirmières québécoises, qui peuvent exercer dès leur arrivée.
Mais c’est également, selon elle, deux philosophies qui s’affrontent au sein de l’accord bipartite. « Du côté français, on voulait favoriser la mobilité, du côté québécois, c’était pour répondre à un besoin du marché du travail. Aujourd’hui on ferme les vannes, c’est dommage », considère Mme Idel Mehdaoui.
RSQ ne recrute plus
Du côté de Regroupement Santé Québec (RSQ), « mandaté par le MSSS (ministère de la santé et des services sociaux) pour recruter des professionnels de la santé et des services sociaux ayant obtenu un diplôme hors du Canada afin notamment de combler les besoins de main-d’oeuvre du réseau de la santé québécois », on se fait discret, puisque nos demandes d’entrevues ont été déclinées.
D’une autre source, on apprend que RSQ ne s’est pas rendu au salon des infirmières en France cette année, alors que l’organisme faisait le voyage tous les ans. Le voyage aurait été annulé au dernier moment à cause du faible nombre de contrats à proposer (une trentaine pour Sainte-Justine, et trois pour le CHUM). Selon RSQ, 400 professionnels de santé ont été recrutés à l’étranger entre 2012 et 2014, 221 en 2015 et 26 en 2016.
(crédit photo : IFSI – CHIMM)
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http://www.ordre-infirmiers.fr/espace-presse/les-grands-dossiers/arm-france-quebec.html
L’arrangement de reconnaissance mutuelle (ARM) des qualifications professionnelles a été signé le 30 juin 2010 entre l’Ordre des infirmiers et infirmières du Québec (OIIQ) et l’Ordre des infirmiers de France, puis par le ministre chargé de la Santé. Il permet de faciliter et d’accélérer les migrations, dans un sens ou dans l’autre, des infirmières et des infirmiers ayant obtenu leur titre de formation sur le territoire français (diplôme d’infirmier diplômé d’État) ou québécois (diplôme de Bachelier), sans considération de leur nationalité.