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Secteur sanitaire: les troubles mentaux liés au travail ont-ils été multipliés par dix ?
Publié le 05/10/2011
Paris, le mercredi 5 octobre 2011 – Le tableau parle de lui-même. Six courbes y décrivent l’évolution de différents groupes de maladies professionnelles entre 2001 et 2009. Dans le secteur de la santé, le nombre de tumeurs, de maladies respiratoires, dermatologiques et de l’audition constatées par les 32 centres de consultation de pathologie professionnelle (CCPP) de France est demeuré stable ou en légère augmentation. En revanche, les troubles musculo-squelettiques et plus encore les troubles mentaux et du comportement ont connu une progression très forte. Ainsi, alors que 38 seulement des pathologies en relation avec le travail (PRT) concernaient en 2001, dans les professions sanitaires, des problèmes psychosociaux, elles étaient 328 en 2009. Désormais, ces troubles sont les maladies professionnelles les plus fréquentes chez ceux travaillant à l’hôpital, devant les maladies dermatologiques. L’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) qui rend public aujourd’hui le bilan du réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles (rnv3p) note que les problèmes psycho-sociaux concernent désormais 31 % des maladies professionnelles recensées dans le secteur de la santé contre 8 % en 2001. Une statistique qui confirme clairement le malaise accru au sein des personnels hospitaliers.
Ce qui est sûr, c’est que les consultations pour troubles psychiques augmentent
Cette forte progression des troubles psychosociaux ne concerne cependant pas seulement le monde de la santé : l’ensemble des secteurs d’activité parait concerné. Aujourd’hui 22 % des PRT sont des troubles mentaux (anxiété, dépression majoritairement), ce qui place ce type de pathologies au second rang des maladies liées au travail, derrière les pathologies respiratoires (24 %) et devant les maladies dermatologiques (17 %), ostéo-articulaires (16 %), les tumeurs (7,6 %) et les pathologies de l’audition (5,6 %). Il apparaît par ailleurs que le monde de la santé n’est pas le secteur où la progression des troubles psychosciaux est la plus forte : les secteurs de l’immobilier de location et des services aux entreprises, l’administration publique, les activités financières et les autres services collectifs et sociaux personnels connaissent des hausses plus marquées encore de la proportion de troubles mentaux en relation avec le travail. Cependant, l’ANSES tend à nuancer la réalité de cette explosion que semblent mettre en lumière ces chiffres en observant qu’il est « difficile de faire la part des choses entre une augmentation due à la propension de plus en plus importante qu’ont les personnes à consulter pour des questions de ce type et un phénomène réel d’augmentation d’incidence ». Pour autant, elle confirme que le nombre de cas ayant une origine professionnelle indubitable a été multiplié par deux entre 2007 et 2009.
Pesticides : les agriculteurs ne vont pas si bien
Parmi les autres enseignements de ces travaux qui ne se concentrent pas uniquement sur cette croissance des troubles psycho-sociaux, on relèvera que contrairement à ce que laissaient supposer les conclusions récentes d’une enquête de la Mutualité sociale agricole (très controversées), les tumeurs semblent bien des pathologies professionnelles plus fréquemment retrouvées dans le monde agricole que dans d’autres secteurs. Ici, les tumeurs représentent en effet 12 % des pathologies (contre 7,6 % de manière globale) et l’ANSES estime très clairement que « les deux tiers sont associés à une exposition professionnelle aux pesticides ». Cependant, l’industrie manufacturière et de la construction demeurent bien plus fréquemment touchées par le risque de tumeurs professionnelles. Par ailleurs, pour 58 % des tumeurs, l’amiante semble devoir être en cause.
Les professionnels de santé sont mieux dans leur peau !
Enfin, le rapport de l’ANSES a tenu à se focaliser cette année sur les allergies professionnelles « dont l’incidence est en augmentation ». Cependant, les asthmes professionnels sont pour leur part en régression. On notera à cet égard les progrès réalisés dans le secteur de la santé : « La diminution des cas en relation avec les expositions au latex et aux aldéhydes confirment les études transversales menés dans le secteur de la santé. Plusieurs études ont en effet observé une modification des pratiques en matière de désinfection avec substitution des produits aldéhydes (formaldéhyde, glutaraldéhyde), en particulier pour les instruments de chirurgie et les endoscopies, et une diminution de l’utilisation des gants en latex poudre remplacés par des gants non poudrés ou à base d’autres matières plastiques ».
Aurélie Haroche