Jeudi 27 novembre 2014 - 17:55
Affaire Morelle/Lundbeck: un projet de décret permettrait à l'ancien conseiller d'échapper à une sanction de l'Igas (presse)
PARIS, 27 novembre 2014 (APM) - Un projet de décret en préparation relatif aux procédures disciplinaires au sein de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) permettrait au chef de l'Etat d'éviter de sanctionner son ancien conseiller politique, Aquilino Morelle, lequel pourrait par ailleurs échapper à toute sanction, a révélé mercredi le site d'informations Mediapart.
Aquilino Morelle a dû quitter précipitamment l'Elysée en avril (cf APM EHRDI004) notamment en raison d'une mission pour Lundbeck (facturée 12.500 euros) réalisée en 2007 alors qu'il était à l'Igas et pour laquelle il n'avait pas déposé de demande d'autorisation (cf APM EHRDI003).
Fin septembre, dans un entretien au Monde, l'ancien conseiller a reconnu avoir "effectivement omis" d'adresser une demande d'autorisation à l'Igas, tout en récusant tout conflit d'intérêts. Il accusait par ailleurs à mots couverts le laboratoire Servier d'avoir monté un dossier contre lui afin de se venger du rapport sur l'affaire Mediator*, tout en admettant n'en avoir aucune preuve (cf APM EHRIP005).
Mais, alors qu'Aquilino Morelle est toujours susceptible d'avoir une sanction disciplinaire, "certains ne souhaitent visiblement pas que François Hollande 'condamne' une seconde fois celui qui a connu pendant deux ans une bonne partie des secrets du Palais", note Mediapart dans son article, ajoutant que l'Elysée dément avoir donné une quelconque consigne en ce sens.
Mediapart rapporte le mécontentement du corps d'inspection au sujet d'un projet de décret visant à déléguer au chef de service de l'Igas certaines sanctions. L'objectif serait d'éviter que, conformément à la procédure actuelle, la sanction ne soit prononcée par le chef de l'Etat, sur la base d'un avis d'une commission administrative paritaire (CAP) de l'Igas.
Ce projet de texte, qui émane de la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), modifierait le décret n°2011-931 du 1er août 2011 (cf APM VGOH8002), qui vient tout juste d'être rénové par un décret publié le 31 octobre (cf APM CBRJV002).
Le texte, plusieurs fois retouché et dont l'APM a eu copie, est succinct et ne comporte que deux articles. Son unique objet est d'appliquer à l'Igas l'article 67 de la loi du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, qui "permet de déléguer certaines des sanctions disciplinaires prévues à l'article 66 de la même loi, indépendamment du pouvoir de nomination".
RISQUE DE PREJUGER DU NIVEAU DE SANCTION APPLICABLE
"En application de ces dispositions, le décret confie au chef de l'inspection des affaires sociales le pouvoir de prononcer, à l'encontre des membres du corps de l'Igas, les sanctions disciplinaires des premier et deuxième groupes", précise la notice du texte.
Or ces sanctions disciplinaires sont les plus faibles et correspondent aux avertissements et aux blâmes d'une part, et à la radiation du tableau d'avancement, à l'abaissement d'échelon, à l'exclusion temporaire de fonctions et au déplacement d'office, d'autre part.
Une telle évolution conduirait à préjuger, avant même l'ouverture d'une procédure contradictoire, du niveau de sanction applicable, alors que le niveau pertinent de sanction n'est normalement déterminé qu'à l'issue de l'examen du dossier, s'alarme le Syndicat des membres de l'Inspection générale des affaires sociales (Smigas) dans un bulletin d'information interne diffusé en novembre.
Pour Mediapart, cela augurerait même d'une décision plutôt favorable à l'égard d'Aquilino Morelle, alors qu'aucune procédure disciplinaire n'a encore été lancée à son encontre.
"Aucune concertation officielle n'a été menée à l'Igas sur le sujet, comme s'il fallait éviter toute réflexion, toute publicité", observe Mediapart. Ce site rapporte que le texte a pourtant reçu un avis défavorable de l'ensemble des structures syndicales en comité technique ministériel les 7 et 26 novembre (mercredi).
Contacté par l'APM, le Smigas a confirmé l'agacement suscité par ce projet, dont il réclame le retrait.
Le syndicat, qui a demandé en mai au président de la République l'ouverture d'une enquête administrative sur le cas d'Aquilino Morelle, a consacré une grande partie de son bulletin interne de novembre à ce projet de décret, qualifié de "bricolage d'autant plus manifeste" que le statut de l'Igas vient d'être modifié par le décret publié le 31 octobre.
Pour le Smigas, ce projet de décret est un texte "ad hoc", "destiné à masquer l'inaction durable de l'administration sur un dossier particulier".
Il rappelle qu'en droit de la fonction publique, le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité de nomination, en l'occurrence au président de la République pour les inspecteurs généraux de l'inspection générale de l'administration (IGA), l'inspection générale des finances (IGF) et l'Igas. Or ce dernier "n'a jamais délégué ce pouvoir aux chefs d'inspection" et "le faire aujourd'hui serait une réforme institutionnelle dont l'impact mérite d'être réfléchi, ce qui n'a pas été le cas", selon le Smigas.
Il aurait été question initialement que les modifications concernent les trois corps d'inspection, mais le projet de texte soumis à concertation ne vise désormais plus que l'Igas, "à moins que l'intention n'ait été dès l'abord de viser exclusivement l'Igas", note le syndicat.
Le syndicat soulève par ailleurs les difficultés posées par l'absence de procédure collégiale, et donc de garanties en termes de droits de la défense, qu'entraînerait une délégation pour les sanctions visées par le texte.
vg/ab/APM polsan
redaction@apmnews.com
VG9NFOY0B 27/11/2014 17:55 ACTU PHARMA
Affaire Morelle/Lundbeck: un projet de décret permettrait à l'ancien conseiller d'échapper à une sanction de l'Igas (presse)
PARIS, 27 novembre 2014 (APM) - Un projet de décret en préparation relatif aux procédures disciplinaires au sein de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) permettrait au chef de l'Etat d'éviter de sanctionner son ancien conseiller politique, Aquilino Morelle, lequel pourrait par ailleurs échapper à toute sanction, a révélé mercredi le site d'informations Mediapart.
Aquilino Morelle a dû quitter précipitamment l'Elysée en avril (cf APM EHRDI004) notamment en raison d'une mission pour Lundbeck (facturée 12.500 euros) réalisée en 2007 alors qu'il était à l'Igas et pour laquelle il n'avait pas déposé de demande d'autorisation (cf APM EHRDI003).
Fin septembre, dans un entretien au Monde, l'ancien conseiller a reconnu avoir "effectivement omis" d'adresser une demande d'autorisation à l'Igas, tout en récusant tout conflit d'intérêts. Il accusait par ailleurs à mots couverts le laboratoire Servier d'avoir monté un dossier contre lui afin de se venger du rapport sur l'affaire Mediator*, tout en admettant n'en avoir aucune preuve (cf APM EHRIP005).
Mais, alors qu'Aquilino Morelle est toujours susceptible d'avoir une sanction disciplinaire, "certains ne souhaitent visiblement pas que François Hollande 'condamne' une seconde fois celui qui a connu pendant deux ans une bonne partie des secrets du Palais", note Mediapart dans son article, ajoutant que l'Elysée dément avoir donné une quelconque consigne en ce sens.
Mediapart rapporte le mécontentement du corps d'inspection au sujet d'un projet de décret visant à déléguer au chef de service de l'Igas certaines sanctions. L'objectif serait d'éviter que, conformément à la procédure actuelle, la sanction ne soit prononcée par le chef de l'Etat, sur la base d'un avis d'une commission administrative paritaire (CAP) de l'Igas.
Ce projet de texte, qui émane de la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), modifierait le décret n°2011-931 du 1er août 2011 (cf APM VGOH8002), qui vient tout juste d'être rénové par un décret publié le 31 octobre (cf APM CBRJV002).
Le texte, plusieurs fois retouché et dont l'APM a eu copie, est succinct et ne comporte que deux articles. Son unique objet est d'appliquer à l'Igas l'article 67 de la loi du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, qui "permet de déléguer certaines des sanctions disciplinaires prévues à l'article 66 de la même loi, indépendamment du pouvoir de nomination".
RISQUE DE PREJUGER DU NIVEAU DE SANCTION APPLICABLE
"En application de ces dispositions, le décret confie au chef de l'inspection des affaires sociales le pouvoir de prononcer, à l'encontre des membres du corps de l'Igas, les sanctions disciplinaires des premier et deuxième groupes", précise la notice du texte.
Or ces sanctions disciplinaires sont les plus faibles et correspondent aux avertissements et aux blâmes d'une part, et à la radiation du tableau d'avancement, à l'abaissement d'échelon, à l'exclusion temporaire de fonctions et au déplacement d'office, d'autre part.
Une telle évolution conduirait à préjuger, avant même l'ouverture d'une procédure contradictoire, du niveau de sanction applicable, alors que le niveau pertinent de sanction n'est normalement déterminé qu'à l'issue de l'examen du dossier, s'alarme le Syndicat des membres de l'Inspection générale des affaires sociales (Smigas) dans un bulletin d'information interne diffusé en novembre.
Pour Mediapart, cela augurerait même d'une décision plutôt favorable à l'égard d'Aquilino Morelle, alors qu'aucune procédure disciplinaire n'a encore été lancée à son encontre.
"Aucune concertation officielle n'a été menée à l'Igas sur le sujet, comme s'il fallait éviter toute réflexion, toute publicité", observe Mediapart. Ce site rapporte que le texte a pourtant reçu un avis défavorable de l'ensemble des structures syndicales en comité technique ministériel les 7 et 26 novembre (mercredi).
Contacté par l'APM, le Smigas a confirmé l'agacement suscité par ce projet, dont il réclame le retrait.
Le syndicat, qui a demandé en mai au président de la République l'ouverture d'une enquête administrative sur le cas d'Aquilino Morelle, a consacré une grande partie de son bulletin interne de novembre à ce projet de décret, qualifié de "bricolage d'autant plus manifeste" que le statut de l'Igas vient d'être modifié par le décret publié le 31 octobre.
Pour le Smigas, ce projet de décret est un texte "ad hoc", "destiné à masquer l'inaction durable de l'administration sur un dossier particulier".
Il rappelle qu'en droit de la fonction publique, le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité de nomination, en l'occurrence au président de la République pour les inspecteurs généraux de l'inspection générale de l'administration (IGA), l'inspection générale des finances (IGF) et l'Igas. Or ce dernier "n'a jamais délégué ce pouvoir aux chefs d'inspection" et "le faire aujourd'hui serait une réforme institutionnelle dont l'impact mérite d'être réfléchi, ce qui n'a pas été le cas", selon le Smigas.
Il aurait été question initialement que les modifications concernent les trois corps d'inspection, mais le projet de texte soumis à concertation ne vise désormais plus que l'Igas, "à moins que l'intention n'ait été dès l'abord de viser exclusivement l'Igas", note le syndicat.
Le syndicat soulève par ailleurs les difficultés posées par l'absence de procédure collégiale, et donc de garanties en termes de droits de la défense, qu'entraînerait une délégation pour les sanctions visées par le texte.
vg/ab/APM polsan
redaction@apmnews.com
VG9NFOY0B 27/11/2014 17:55 ACTU PHARMA