L'Ordre infirmier montre du doigt les failles du répertoire Adeli pour justifier son existence
08/07/14 - 14h13 - HOSPIMEDIA |
Les récentes statistiques sur les professions de santé sont à considérer avec précaution, reconnaît elle-même la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees). Dans la foulée, l'Ordre des infirmiers en profite pour faire valoir l'inscription au tableau pour pouvoir disposer de données fiables.
Les statistiques du répertoire Adeli (Automatisation des listes) sont sujettes à caution, de l'aveu même de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees). Dans son dernier recensement des professions de santé au 1er janvier 2014 (à télécharger ci-contre), elle met en effet en garde : "Malgré les différentes opérations qualité mises en œuvre au fil des années et l’obligation légale d’inscription, le répertoire Adeli présente des fragilités qui justifient que l’on considère avec précaution les statistiques présentées ici." D'une part, les professionnels de santé ne procèdent pas systématiquement à leur désinscription du répertoire lorsqu'ils cessent leur activité, que ce soit provisoirement ou définitivement. D'autre part, ils ne signalent pas non plus systématiquement un changement de situation professionnelle comme un nouveau mode d'exercice ou un nouveau département d'exercice. Sans compter que certains professionnels dont les infirmiers "semblent tarder à faire enregistrer leur diplôme au répertoire", remarque la Drees. Par conséquent, "le répertoire Adeli sous-estime potentiellement les jeunes professionnels en activité et sur-représente les plus âgés", reconnaît-elle volontiers.
Entre 2012 et 2013, la hausse des effectifs infirmiers est "sensiblement supérieure au taux d’accroissement annuel observé au cours des années précédentes", note la Drees. Le nombre d'infirmiers actifs enregistrés au répertoire Adeli est ainsi passé de 567 564 à 595 594, soit une augmentation de 4,9 % (contre 3,5 % entre 2011 et 2012). "Si le dynamisme des effectifs annuels de diplômés d’écoles d’infirmiers explique une partie de ces hausses importantes, une certaine surestimation du nombre d’infirmiers en activité répertoriés dans Adeli n’est pas à écarter", prévient encore la Drees. Cette dernière complète : "On notera cependant que le taux d’accroissement 2013-2014 est revenu à son niveau d’avant 2012-2013, soit environ 3,5 %."
"Disposer de statistiques fiables"
Ces aveux de faiblesse sont repris à bon compte par l'Ordre national des infirmiers (Oni). Dans un communiqué diffusé ce 8 juillet, l'Oni estime "impérieuse" la nécessité de "disposer de statistiques fiables pour une offre de soins optimisée". "Une des principales priorités de la future loi de Santé est d'organiser sur chaque territoire une offre de santé accessible à tous. Comment peut-on viser un tel objectif à partir de statistiques que le ministère de la Santé reconnaît lui-même comme étant erronées et surévaluées ?", interroge le président de l'Ordre, Didier Borniche. Il en déduit : "Cet aveu prouve que l'administration ne peut tout faire et qu'elle doit s'appuyer sur les acteurs de la santé." Selon lui, "l'inscription obligatoire au tableau de l'ordre avec une cotisation modique constitue (...) un mécanisme assurant la production de statistiques actualisées et fiables".
Le président de l'Oni appelle par conséquent le ministère de la Santé, les ARS et les établissements employeurs "à travailler en partenariat avec l'ordre et à promouvoir l'inscription au tableau". Pour l'Oni, "un des apports très utiles des ordres professionnels réside dans les atlas démographiques qu'ils éditent". Il se demande en conclusion pourquoi cette utilité n'est pas reconnue à l'ordre des infirmiers, dont l'existence est aujourd'hui plutôt contestée (lire ci-contre).
Migration d'Adeli vers le RPPS
La Drees fait quant à elle savoir qu'au 1er janvier 2014, les pharmaciens, les sages-femmes et les chirurgiens-dentistes ont basculé du répertoire Adeli au répertoire partagé des professionnels de santé (RPPS). "Une migration du répertoire Adeli vers le RPPS est également prévue, à plus ou moins court terme, pour les professions de masseurs-kinésithérapeutes et de pédicures-podologues", précise-t-elle. Les médecins ne sont, eux, pas compris dans cette série de statistiques : à partir de cette année, les données les concernant ont été mises en ligne sur le site "data.drees". Les statistiques pour les autres professions de santé devraient d'ailleurs également être diffusées ainsi à partir de 2015.
La Drees rappelle que le RPPS a été créé avec pour objectifs principaux de :
•simplifier les démarches administratives des professionnels de santé ;
•mettre à disposition de l’ensemble des partenaires de la santé des informations fiables et opposables nécessaires à l’organisation des soins ;
•disposer d’un outil fédérateur indispensable au suivi de la démographie des professionnels de santé ;
•créer un système d’échanges permettant le partage des informations entre les acteurs du domaine de la santé (État, Ordres, Assurance maladie, Service de santé des armées, etc.).
"Ce répertoire concerne dans une première phase les quatre professions médicales dotées d’un ordre (médecins, pharmaciens, chirurgiens-dentistes, sages-femmes) et a vocation à intégrer progressivement les autres professions de santé", poursuit la Drees. Le RPPS est ainsi opérationnel pour les pharmaciens depuis le 18 janvier 2010, pour les sages-femmes depuis le 1er septembre 2010, pour les chirurgiens-dentistes depuis le 12 septembre 2011 et pour les médecins depuis le 10 novembre 2011. Les ordres jouent dans leurs cas le rôle de guichet principal. La Drees indique : "Pour les autres professions qui intégreront le RPPS après 2014, les ARS seront le guichet unique d’enregistrement."
Sandra Jégu
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