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Stratégie nationale de santé : les infirmières libérales dépitées
Deux syndicats dénoncent la mise à l’écart des infirmières libérales dans le projet de refondation du système de santé présenté le 23 septembre par Marisol Touraine.
Fait assez rare pour être souligné : pour une fois, la Fédération nationale des infirmiers (FNI) et le Syndicat des infirmiers et infirmières libérales (Sniil) sont d’accord ! La Stratégie nationale de santé (SNS) présentée par la ministre de la Santé laisse, selon eux, les infirmières libérales sur le banc de touche. Tous pouvoirs donnés aux médecins, absence de considération des infirmières libérales, non reconnaissance de leur rôle fondamental dans le parcours de soin… les critiques vont bon train.
Inégalité
Le Sniil regrette que l’autonomie des infirmières libérales ne soit pas consacrée. Les professionnels de santé vont devoir travailler « en équipe autour du médecin traitant » et non « autour du patient ». « Cette différence de taille place donc, encore et toujours, le seul médecin au cœur du dispositif de santé, niant d’office les compétences et l’autonomie des autres professionnels de santé et allant à l’encontre des besoins des patients », considère le syndicat dans un communiqué.
Alors que la ministre a annoncé vouloir réduire les inégalités existant dans le système de santé, d’après le Sniil, elle en instaure une autre : « l’inégalité de traitement entre les différents professionnels de santé », avec le médecin élevé au rang de « pivot de la politique de prévention » et « du parcours de soins des personnes ». Les autres professionnels de santé n’auront donc pour missions « que de suivre ses consignes ».
Le Sniil se demande alors comment, dans un contexte démographique tendu, les médecins pourront réellement assumer ces nouvelles missions. Le syndicat a rappelé que sur le terrain, ce sont « les infirmières libérale seules, tenues par la loi à la continuité des soins, qui sont en première ligne auprès des patients 7j/7j et 24h/24h. Et ce, sans avoir obtenu aucun titre d’infirmière clinicienne ou même d’autorisation pour la délégation de certaines ″tâches″ qu’elles effectuent pourtant quotidiennement ». L’accélération des transferts de compétences et la création de nouveaux métiers, dont celui d’infirmière clinicienne, font, en effet, partie des mesures annoncées dans le cadre de la SNS.
Émancipation
Même son de cloche du côté de la FNI, qui rappelle que les infirmières libérales « ont été les premières à se regrouper et à s’organiser pour assurer la continuité des soins, en endossant des responsabilités et en remplissant des missions d’intérêt général qui s’apparentent à un service public de proximité. Le tout sans jamais appliquer de dépassements d’honoraires ».
Si le syndicat affirme souscrire aux trois piliers sur lesquels repose la SNS - la prévention, la « révolution du premier recours », et les droits des patients - il regrette que la ministre de la Santé n’ait pas « pris la mesure des bénéfices […] que représente l’exercice libéral en terme d’émancipation pour les femmes face au pouvoir médical ». Une émancipation ayant permis de démontrer leur capacité à mieux s’organiser pour qu’il n’y ait pas de rupture dans la chaîne des soins.
Avec l’annonce de sa « révolution », Marisol Touraine fait « tomber le couperet » sur « l’autonomie et l’indépendance acquise des infirmières libérales, comme sur leurs aspirations à pouvoir mettre l’intégralité de leurs compétences au service des Français », conclut la FNI.
Laure Martin