Jeudi 27 novembre 2014 - 20:06
Infirmières de nuit en Ehpad: l'ARS Ile-de-France s'inquiète pour son expérimentation
(Par Valérie LESPEZ, aux Assises nationales du médecin coordonnateur en Ehpad)
PARIS, 27 novembre 2014 (APM) - L'agence régionale de santé (ARS) Ile-de-France, par la voix de son directeur du pôle médico-social, Marc Bourquin, a fait part de son inquiétude quant au devenir de l'expérimentation de mutualisation d'infirmières de nuit menée dans des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) franciliens.
Marc Bourquin s'exprimait lors des 12èmes Assises nationales du médecin coordonnateur en Ehpad, organisées par la société EHPA, qui se sont tenus mardi et mercredi à Paris.
Le directeur du pôle médico-social de l'ARS Ile-de-France a rappelé que la région s'était lancée dans une expérimentation d'équipes mutualisées d'infirmières de nuit pour 20 Ehpad. Il ne s'agit pas d'une simple astreinte, a-t-il précisé: "Une infirmière vient toutes les nuits dans chacun des Ehpad".
"On a un retour d'expérience extrêmement favorable, à la fois en termes de qualité et d'échange d'expériences, de montée en compétences des équipes, et aussi avec des économies sur les hospitalisations qui sont considérables, et une forte amélioration du suivi des soins palliatifs et de la fin de vie", a-t-il fait valoir.
"Si on veut aller plus loin sur ces démarches, nous pensons qu'il faut les généraliser, ce qui suppose évidemment de changer les règles du jeu à la fois en termes d'autorisation mais aussi en termes de flux financiers", a-t-il assuré.
C'est là que le bât blesse, a regretté Marc Bourquin, signifiant qu'il faudrait pour cela que le directeur général de l'ARS puisse passer d'enveloppes financières "ciblées" à un "système de financement plus global, sans que cela coûte plus cher, mais où on puisse, de manière indifférenciée, jouer sur toute la palette des financements".
Dans le cas précis de cette expérimentation, il a souligné qu'il "nous faut trouver une vingtaine de millions [d'euros] pour généraliser les équipes mutualisées d'infirmières en Ehpad", sachant que l'ARS "a de bonnes raisons de penser que cela fera globalement une économie de 80 ou 100 millions d'euros".
"Mais aujourd'hui, le scénario le plus probable, si on ne parvient pas à transférer ces ressources du champ MCO [médecine, chirurgie, obstétrique] à celui des Ehpad, c'est qu'on ne pourra pas poursuivre cette expérimentation. Non seulement, on ne pourra pas la généraliser, mais on ne pourra pas la poursuivre", s'est-il inquiété.
Le Dr Jean-Achille Cozic, conseiller médical du groupe spécialisé dans la prise en charge de la dépendance, Le Noble Age, a appuyé les propos de Marc Bourquin sur deux aspects.
Il a appelé à "une vraie fusion, une fongibilité absolue des enveloppes". Il a par ailleurs loué les expérimentations de présence infirmière dans les Ehpad, à certaines conditions. Il a expliqué que des Ehpad du Noble Age étaient impliqués "dans quatre expérimentations [d'astreinte infirmière] dans quatre territoires différents avec quatre réalisations et résultats différents".
Les résultats sont positifs là où les personnels d'astreinte connaissent les équipes des Ehpad, a-t-il expliqué. Il a notamment cité un territoire où l'expérimentation concerne des Ehpad publics, des Ehpad associatifs et des Ehpad commerciaux, "le tout porté par un Clic [centre local d'information et de coordination]". "Cela marche très bien car on avait bien insisté pour qu'avant que cela ne commence, les équipes se connaissent et se rencontrent".
Neuf mois après le début de cette expérimentation, "on a diminué [...] de façon certaine les appels intempestifs au 15 la nuit" et "du coup, des acteurs qui ne travaillaient pas beaucoup entre eux" le font désormais. Cela a notamment permis qu'"il y ait une infirmière [du service des urgences voisin] qui puisse répondre à l'infirmière d'astreinte en cas de besoin".
L'EHPAD, COORDONNATEUR DE PROXIMITE
Jean-Achille Cozic a par ailleurs souligné la difficulté d'acteurs comme le groupe Noble Age quand ils veulent "créer des pôles de santé" comprenant des unités de soins de longue durée (USLD), des soins de suite et de réadaptation (SSR), des hôpitaux de jour, des places d'Ehpad, de l'hébergement temporaire et de l'hospitalisation à domicile (HAD).
"C'est hyper compliqué de faire adhérer à un projet global de parcours tout le monde", citant les réticences des médecins, mais aussi les éventuelles mésententes entre les ARS et les conseils généraux. "Les territoires choisis par les conseils généraux pour telle ou telle implantation ne sont pas forcément les territoires de l'ARS, même préférentiellement si c'est possible pas les mêmes", a-t-il assuré en plaisantant à moitié.
Le directeur du pôle médico-social de l'ARS Ile-de-France a reconnu qu'"il ne suffit pas de dire 'il faut mieux articuler'. La question fondamentale est de voir comment les institutions publiques peuvent créer réellement un intérêt à agir entre les différents acteurs".
Il a ajouté par ailleurs qu'"au fond, il faudrait arriver à lever tout ce qui sépare, dans le fonctionnement, les services pour le domicile, que ce soit les services d'aide à domicile, les Ssiad [services de soins infirmiers à domicile] et même l'HAD. Il faudrait arriver à un service unique qui, pour une personne âgée en perte d'autonomie, assurerait l'ensemble de la prise en charge".
"L'objectif [serait] à terme que les Ehpad et les médecins coordonnateurs deviennent les coordonnateurs sur un territoire de proximité de l'ensemble de [cette] prise en charge. L'Ehpad serait le lieu qui permet de coordonner ces services de proximité au bénéfice de la personne âgée", a-t-il poursuivi, convenant que cette approche demandait notamment "des évolutions institutionnelles" et financières.
vl/ab/APM polsan
redaction@apmnews.com
VL7NFNMM6 27/11/2014 20:06 ACTU
Infirmières de nuit en Ehpad: l'ARS Ile-de-France s'inquiète pour son expérimentation
(Par Valérie LESPEZ, aux Assises nationales du médecin coordonnateur en Ehpad)
PARIS, 27 novembre 2014 (APM) - L'agence régionale de santé (ARS) Ile-de-France, par la voix de son directeur du pôle médico-social, Marc Bourquin, a fait part de son inquiétude quant au devenir de l'expérimentation de mutualisation d'infirmières de nuit menée dans des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) franciliens.
Marc Bourquin s'exprimait lors des 12èmes Assises nationales du médecin coordonnateur en Ehpad, organisées par la société EHPA, qui se sont tenus mardi et mercredi à Paris.
Le directeur du pôle médico-social de l'ARS Ile-de-France a rappelé que la région s'était lancée dans une expérimentation d'équipes mutualisées d'infirmières de nuit pour 20 Ehpad. Il ne s'agit pas d'une simple astreinte, a-t-il précisé: "Une infirmière vient toutes les nuits dans chacun des Ehpad".
"On a un retour d'expérience extrêmement favorable, à la fois en termes de qualité et d'échange d'expériences, de montée en compétences des équipes, et aussi avec des économies sur les hospitalisations qui sont considérables, et une forte amélioration du suivi des soins palliatifs et de la fin de vie", a-t-il fait valoir.
"Si on veut aller plus loin sur ces démarches, nous pensons qu'il faut les généraliser, ce qui suppose évidemment de changer les règles du jeu à la fois en termes d'autorisation mais aussi en termes de flux financiers", a-t-il assuré.
C'est là que le bât blesse, a regretté Marc Bourquin, signifiant qu'il faudrait pour cela que le directeur général de l'ARS puisse passer d'enveloppes financières "ciblées" à un "système de financement plus global, sans que cela coûte plus cher, mais où on puisse, de manière indifférenciée, jouer sur toute la palette des financements".
Dans le cas précis de cette expérimentation, il a souligné qu'il "nous faut trouver une vingtaine de millions [d'euros] pour généraliser les équipes mutualisées d'infirmières en Ehpad", sachant que l'ARS "a de bonnes raisons de penser que cela fera globalement une économie de 80 ou 100 millions d'euros".
"Mais aujourd'hui, le scénario le plus probable, si on ne parvient pas à transférer ces ressources du champ MCO [médecine, chirurgie, obstétrique] à celui des Ehpad, c'est qu'on ne pourra pas poursuivre cette expérimentation. Non seulement, on ne pourra pas la généraliser, mais on ne pourra pas la poursuivre", s'est-il inquiété.
Le Dr Jean-Achille Cozic, conseiller médical du groupe spécialisé dans la prise en charge de la dépendance, Le Noble Age, a appuyé les propos de Marc Bourquin sur deux aspects.
Il a appelé à "une vraie fusion, une fongibilité absolue des enveloppes". Il a par ailleurs loué les expérimentations de présence infirmière dans les Ehpad, à certaines conditions. Il a expliqué que des Ehpad du Noble Age étaient impliqués "dans quatre expérimentations [d'astreinte infirmière] dans quatre territoires différents avec quatre réalisations et résultats différents".
Les résultats sont positifs là où les personnels d'astreinte connaissent les équipes des Ehpad, a-t-il expliqué. Il a notamment cité un territoire où l'expérimentation concerne des Ehpad publics, des Ehpad associatifs et des Ehpad commerciaux, "le tout porté par un Clic [centre local d'information et de coordination]". "Cela marche très bien car on avait bien insisté pour qu'avant que cela ne commence, les équipes se connaissent et se rencontrent".
Neuf mois après le début de cette expérimentation, "on a diminué [...] de façon certaine les appels intempestifs au 15 la nuit" et "du coup, des acteurs qui ne travaillaient pas beaucoup entre eux" le font désormais. Cela a notamment permis qu'"il y ait une infirmière [du service des urgences voisin] qui puisse répondre à l'infirmière d'astreinte en cas de besoin".
L'EHPAD, COORDONNATEUR DE PROXIMITE
Jean-Achille Cozic a par ailleurs souligné la difficulté d'acteurs comme le groupe Noble Age quand ils veulent "créer des pôles de santé" comprenant des unités de soins de longue durée (USLD), des soins de suite et de réadaptation (SSR), des hôpitaux de jour, des places d'Ehpad, de l'hébergement temporaire et de l'hospitalisation à domicile (HAD).
"C'est hyper compliqué de faire adhérer à un projet global de parcours tout le monde", citant les réticences des médecins, mais aussi les éventuelles mésententes entre les ARS et les conseils généraux. "Les territoires choisis par les conseils généraux pour telle ou telle implantation ne sont pas forcément les territoires de l'ARS, même préférentiellement si c'est possible pas les mêmes", a-t-il assuré en plaisantant à moitié.
Le directeur du pôle médico-social de l'ARS Ile-de-France a reconnu qu'"il ne suffit pas de dire 'il faut mieux articuler'. La question fondamentale est de voir comment les institutions publiques peuvent créer réellement un intérêt à agir entre les différents acteurs".
Il a ajouté par ailleurs qu'"au fond, il faudrait arriver à lever tout ce qui sépare, dans le fonctionnement, les services pour le domicile, que ce soit les services d'aide à domicile, les Ssiad [services de soins infirmiers à domicile] et même l'HAD. Il faudrait arriver à un service unique qui, pour une personne âgée en perte d'autonomie, assurerait l'ensemble de la prise en charge".
"L'objectif [serait] à terme que les Ehpad et les médecins coordonnateurs deviennent les coordonnateurs sur un territoire de proximité de l'ensemble de [cette] prise en charge. L'Ehpad serait le lieu qui permet de coordonner ces services de proximité au bénéfice de la personne âgée", a-t-il poursuivi, convenant que cette approche demandait notamment "des évolutions institutionnelles" et financières.
vl/ab/APM polsan
redaction@apmnews.com
VL7NFNMM6 27/11/2014 20:06 ACTU