PARIS, 25 novembre 2014 (APM) - La Société de néphrologie (SFN) et la Société francophone de dialyse (SFD) ont alerté l'ensemble de "la communauté néphrologique" du projet de simplification administrative visant les décrets de 2002 relatifs aux établissements de santé traitant les patients insuffisants rénaux chroniques en raison des "lourdes menaces qui pèsent sur la qualité de la dialyse", dans une lettre d'information "urgente et exceptionnelle".
Dans ce courrier diffusé depuis lundi soir, les deux sociétés savantes s'inquiètent des "projets préoccupants" de la direction générale de l'offre de soins (DGOS) de "simplification de la dialyse", après deux réunions d'un groupe de travail en octobre et en novembre.
Ce groupe de travail, qui comprend les représentants des néphrologues, des patients ainsi que des directeurs d'établissements, a examiné principalement "différentes propositions de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) Dialyse visant à remettre en cause les décrets de 2002", et notamment le nombre d'infirmiers dans les établissements pratiquant l'hémodialyse, rapportent-elles.
"La modification des décrets telle qu'elle est proposée aboutirait [notamment] à accepter que dans les centres ou dans les unités de dialyse médicalisée, un infirmier soit obligé d'assurer la prise en charge simultanée de plus de quatre séances de dialyse pendant de longues périodes chaque année, en particulier pendant les périodes de congés", affirment-elles.
Elles jugent cette proposition "totalement inacceptable au moins pour deux raisons". "Tout d'abord, les risques liés au traitement par hémodialyse n'ont pas diminué depuis 2002 […] ; ensuite la charge de travail liée aux soins a augmenté depuis 2002, avec un nombre croissant de patients atteints de comorbidités multiples et porteurs de cathéters d'hémodialyse".
La réglementation actuelle prévoit qu'une présence permanente en cours de séance doit être assurée par au moins un infirmier pour quatre patients et un aide-soignant, ou éventuellement d'un autre infirmier pour huit patients. Le projet de révision propose que soit ajouté "en moyenne et en équivalent temps plein, calculé sur l'année", un "concept (qui) n'a pas de sens pour une activité aussi technique que l'hémodialyse".
La SFN et la SFD s'inquiètent d'autant plus que les différents avis exprimés "seraient transmis à un groupe de travail global du ministère de la santé sur la 'simplification administrative' et que seul ce groupe de travail serait habilité à trancher". Or, seules les fédérations hospitalières participent à ce groupe, ajoutent les sociétés savantes.
Interrogée par l'APM mardi, l'association de patients Renaloo partage cette inquiétude, soulignant que l'ensemble des acteurs consultés, à l'exception de la FHP, "sont opposés à cette évolution".
Concernant le ratio d'infirmiers et d'aides-soignants, "aucune avancée thérapeutique depuis 2002 n'est venue alléger leur travail. Au contraire, les patients vieillissent, sont plus souvent polypathologiques, extrêmement fragiles, ce qui entraîne une augmentation du temps à leur consacrer", renchérit l'association, dans une note transmise à l'APM.
Renaloo pointe aussi dans cette révision des décrets de 2002 la proposition de la DGOS de supprimer toute limite d'utilisation des générateurs de dialyse, soutenue par les fédérations hospitalières contre toutes les autres parties prenantes, alors que cette durée limite avait été mise en place en 2005 parce que "certains établissements ne renouvelaient jamais leurs générateurs, ne respectaient pas les consignes de maintenance [...] ou utilisaient des consommables non adaptés".
L'association prévoit avec la Fédération nationale d'aide aux insuffisants rénaux (Fnair) d'alerter les patients ainsi que des parlementaires.
Une autre association, la Ligue rein & santé, a adressé un message électronique mi-novembre à la DGOS et aux autres membres du groupe de travail pour déplorer le "détricot[age] d'un décret qui satisfait jusqu'ici tout le monde et protégeait les malades".
Une dernière réunion de concertation est prévue le vendredi 19 décembre, indiquent les associations de patients.
ld/ab/APM polsan
redaction@apmnews.com