Infirmière : une place à conquérir
22 mai 2014 | Olivia Dujardin | mots clefs : IDE,
Les infirmières ont beau constituer le groupe professionnel le plus nombreux dans le monde et partager une éthique commune, leurs conditions d'exercice, leurs moyens, leur formation, leurs droits et même leur champ d'action diffèrent beaucoup d'un pays à l'autre. Une table ronde de la rencontre Connecting nurses organisée le 12 mai à Paris a souligné de façon saisissante ces différences, notamment entre les infirmières anglo-saxonnes et françaises.
IDE_masque-300x200-1 « Être infirmière en 2014, c'est passionnant, exigeant et stimulant », a insisté Hélène Salette secrétaire générale (québécoise) du Secrétariat international des infirmières et infirmiers de l'espace francophone (SIDIIEF) lors de la première table ronde de la rencontre Connecting nurses. Mais pas pour toutes les infirmières de la même façon.
En Angleterre, en Irlande, en Ecosse, au Canada et aux Etats-Unis, la pratique avancée des infirmières est très développée et reconnue, a-t-elle observé.
Elles ont une approche polyvalente de leur travail et leur formation leur permet de suivre des patients, de prescrire, pour certaines, des médicaments, de modifier des doses voire d'initier le traitement de patients atteints de maladies chroniques, de réaliser des actes de chirurgie mineurs, etc.
« Le développement des pratiques infirmières avancées a amélioré l'accès aux soins et la santé des patients, a souligné Hélène Salette. Cela permet aussi de diminuer le temps d'attente aux urgences, de réduire les coûts et d'améliorer la satisfaction du public. Les infirmières peuvent être des expertes de la santé. » Elles disposent selon elle d'un énorme potentiel, notamment pour faire bouger les choses dans le domaine de la santé.
Rôle politique
Etre infirmière en 2014, « c'est aussi extrêmement gratifiant », a poursuivi Anne Felton, présidente de la Fondation des infirmières européennes en diabétologie.
Selon elle, les infirmières britanniques ont obtenu ces avancées à force de défendre leurs positions sur un plan politique. « C'est important, a-t-elle martelé, que les infirmières soient des défenseurs politiques » de leur profession.
Tout comme Florence Nightingale l'a été en son temps. Les « nurses » britanniques bénéficient d'une reconnaissance historique de leur autonomie et disposent d'un « collège royal », au même titre que les médecins.
"Une absence flagrante d'infirmières à des postes de direction en dehors de la seule délivrance des soins"
Pour Anne Felton, cette compétence politique s'acquiert. Mais ne semble pas encore acquise partout. Un sondage mené dans le cadre de Connecting nurses montre en effet « une absence flagrante d'infirmières à des postes de direction en dehors de la seule délivrance des soins », a ajouté Anne Felton. A l'OMS comme dans les grands laboratoires pharmaceutiques...
Au Royaume-uni, a-t-elle pourtant souligné, il existe un « chief nursing officer » au même titre qu'un « chief medical officer » au niveau exécutif de chaque « nation » britannique (Angleterre, Pays de Galles, Irlande du Nord, Ecosse). Selon elle, tant qu'il n'y aura pas plus d'infirmières à ce niveau exécutif, il est très peu probable qu'elles soient mieux entendues et reconnues. « On ne peut pas toujours blâmer les autres, a insisté Anne Felton. Nous devons nous emparer de cela nous-mêmes ! »
Retard français
Felicity Kelliher, infirmière cadre de santé, chargée de mission à l'Association française pour le développement de l'éducation thérapeutique (AFDET), qui a aussi travaillé dans son pays d'origine, l'Irlande, mesure bien la différence avec la situation des infirmières en France.
Au début du XXe siècle, elles ont cessé d'être des « travailleuses sociales » pour devenir des infirmières hospitalières, techniciennes... et assistantes des médecins. « Une image qui colle à la profession depuis 80 ans », a-t-elle souligné.
Leur rôle propre, qui existe depuis 1978, est mal reconnu, le niveau universitaire de leur diplôme pas mieux et leur droit de prescription de certains dispositifs médicaux -qu'elles n'ont pas demandé, a remarqué Felicity Kelliher- est mal connu... Sans parler de la difficulté l'Ordre des infirmiers à exister.
« Tout est une question de politique et de stratégie ! »
Elles ne pèsent pas lourd également dans les réformes engagées, a poursuivi l'infirmière : les « directeurs des soins » sont devenus des « coordinateurs des soins » et peuvent être des kinésithérapeutes ou des manipulateurs radio.
Le début de pratique avancée est selon elle pondéré par le fait qu'elle se conjugue en France au pluriel car elle se décline, localement seulement, en plusieurs délégations de tâches médicales. « Il ne s'agit pas d'une véritable extension du rôle des infirmières », regrette-t-elle.
Pour Hélène Salette un changement de stratégie pourrait peut-être faire bouger les lignes au profit des infirmières françaises. Notamment en démontrant davantage, de façon positive, leur compétence et leurs qualités dans le cadre d'une démarche plus politique que revendicative. Selon elle,« tout est une question de politique et de stratégie ! »
Olivia Dubois
http://www.actusoins.com/22147/infirmiere-place-conquerir.html
22 mai 2014 | Olivia Dujardin | mots clefs : IDE,
Les infirmières ont beau constituer le groupe professionnel le plus nombreux dans le monde et partager une éthique commune, leurs conditions d'exercice, leurs moyens, leur formation, leurs droits et même leur champ d'action diffèrent beaucoup d'un pays à l'autre. Une table ronde de la rencontre Connecting nurses organisée le 12 mai à Paris a souligné de façon saisissante ces différences, notamment entre les infirmières anglo-saxonnes et françaises.
IDE_masque-300x200-1 « Être infirmière en 2014, c'est passionnant, exigeant et stimulant », a insisté Hélène Salette secrétaire générale (québécoise) du Secrétariat international des infirmières et infirmiers de l'espace francophone (SIDIIEF) lors de la première table ronde de la rencontre Connecting nurses. Mais pas pour toutes les infirmières de la même façon.
En Angleterre, en Irlande, en Ecosse, au Canada et aux Etats-Unis, la pratique avancée des infirmières est très développée et reconnue, a-t-elle observé.
Elles ont une approche polyvalente de leur travail et leur formation leur permet de suivre des patients, de prescrire, pour certaines, des médicaments, de modifier des doses voire d'initier le traitement de patients atteints de maladies chroniques, de réaliser des actes de chirurgie mineurs, etc.
« Le développement des pratiques infirmières avancées a amélioré l'accès aux soins et la santé des patients, a souligné Hélène Salette. Cela permet aussi de diminuer le temps d'attente aux urgences, de réduire les coûts et d'améliorer la satisfaction du public. Les infirmières peuvent être des expertes de la santé. » Elles disposent selon elle d'un énorme potentiel, notamment pour faire bouger les choses dans le domaine de la santé.
Rôle politique
Etre infirmière en 2014, « c'est aussi extrêmement gratifiant », a poursuivi Anne Felton, présidente de la Fondation des infirmières européennes en diabétologie.
Selon elle, les infirmières britanniques ont obtenu ces avancées à force de défendre leurs positions sur un plan politique. « C'est important, a-t-elle martelé, que les infirmières soient des défenseurs politiques » de leur profession.
Tout comme Florence Nightingale l'a été en son temps. Les « nurses » britanniques bénéficient d'une reconnaissance historique de leur autonomie et disposent d'un « collège royal », au même titre que les médecins.
"Une absence flagrante d'infirmières à des postes de direction en dehors de la seule délivrance des soins"
Pour Anne Felton, cette compétence politique s'acquiert. Mais ne semble pas encore acquise partout. Un sondage mené dans le cadre de Connecting nurses montre en effet « une absence flagrante d'infirmières à des postes de direction en dehors de la seule délivrance des soins », a ajouté Anne Felton. A l'OMS comme dans les grands laboratoires pharmaceutiques...
Au Royaume-uni, a-t-elle pourtant souligné, il existe un « chief nursing officer » au même titre qu'un « chief medical officer » au niveau exécutif de chaque « nation » britannique (Angleterre, Pays de Galles, Irlande du Nord, Ecosse). Selon elle, tant qu'il n'y aura pas plus d'infirmières à ce niveau exécutif, il est très peu probable qu'elles soient mieux entendues et reconnues. « On ne peut pas toujours blâmer les autres, a insisté Anne Felton. Nous devons nous emparer de cela nous-mêmes ! »
Retard français
Felicity Kelliher, infirmière cadre de santé, chargée de mission à l'Association française pour le développement de l'éducation thérapeutique (AFDET), qui a aussi travaillé dans son pays d'origine, l'Irlande, mesure bien la différence avec la situation des infirmières en France.
Au début du XXe siècle, elles ont cessé d'être des « travailleuses sociales » pour devenir des infirmières hospitalières, techniciennes... et assistantes des médecins. « Une image qui colle à la profession depuis 80 ans », a-t-elle souligné.
Leur rôle propre, qui existe depuis 1978, est mal reconnu, le niveau universitaire de leur diplôme pas mieux et leur droit de prescription de certains dispositifs médicaux -qu'elles n'ont pas demandé, a remarqué Felicity Kelliher- est mal connu... Sans parler de la difficulté l'Ordre des infirmiers à exister.
« Tout est une question de politique et de stratégie ! »
Elles ne pèsent pas lourd également dans les réformes engagées, a poursuivi l'infirmière : les « directeurs des soins » sont devenus des « coordinateurs des soins » et peuvent être des kinésithérapeutes ou des manipulateurs radio.
Le début de pratique avancée est selon elle pondéré par le fait qu'elle se conjugue en France au pluriel car elle se décline, localement seulement, en plusieurs délégations de tâches médicales. « Il ne s'agit pas d'une véritable extension du rôle des infirmières », regrette-t-elle.
Pour Hélène Salette un changement de stratégie pourrait peut-être faire bouger les lignes au profit des infirmières françaises. Notamment en démontrant davantage, de façon positive, leur compétence et leurs qualités dans le cadre d'une démarche plus politique que revendicative. Selon elle,« tout est une question de politique et de stratégie ! »
Olivia Dubois
http://www.actusoins.com/22147/infirmiere-place-conquerir.html